Novembre 2023 : 3 décrets d’application liés au ZAN

La loi Climat et résilience du 22 août 2021 fixe l’objectif d’atteindre le « zéro artificialisation nette des sols » (ZAN) en 2050, avec un objectif intermédiaire de réduction de moitié de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers dans les dix prochaines années, d’ici à 2031. Jusqu’alors, plus de 20 000 hectares sont artificialisés chaque année en France métropolitaine. La loi du 20 juillet 2023 visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à renforcer l’accompagnement des élus locaux ajuste les dispositions de la loi climat résilience du 22 août 2021, afin de donner davantage de marges de manœuvre aux territoires.

Les décrets d’application, publiés le 28 novembre 2023 au Journal officiel, viennent préciser la territorialisation des objectifs de zéro artificialisation nette (ZAN), la nomenclature des surfaces artificialisées et les modalités de fonctionnement de la commission régionale de conciliation.


Définition des surfaces artificialisées ou non artificialisées

Le décret n°2023-1096 fixe la nomenclature des sols artificialisés, c’est-à-dire la définition des types d’espaces retenus pour le calcul du ZAN.

Ainsi, les surfaces, dont les sols sont soit imperméabilisés en raison du bâti ou d’un revêtement, soit stabilisés et compactés, soit constitués de matériaux composites, sont qualifiées de surfaces artificialisées. De même, les surfaces végétalisées herbacées et qui sont à usage résidentiel, de production secondaire ou tertiaire, ou d’infrastructures, sont considérées comme artificialisées. Les surfaces entrant dans ces catégories, qui sont en chantier ou à l’abandon, sont également considérées comme artificialisées.

Ce décret fixe aussi les seuils de référence à partir desquels pourront être qualifiées ces surfaces artificialisées  : 50 m² d’emprise au sol pour le bâti et 2 500 m² pour les autres catégories de surface ; 5 mètres de large pour les infrastructures linéaires et au moins 25 % de boisement d’une surface végétalisée pour qu’elle ne soit pas seulement considérée comme herbacée.

En revanche, sont qualifiées comme non artificialisées  : les surfaces qui sont soit naturelles, nues ou couvertes d’eau, soit végétalisées, constituant un habitat naturel ou utilisées à usage de cultures, y compris les surfaces d’agriculture urbaine et les surfaces boisées ou arbustives dans l’espace urbain. Le décret confirme que les surfaces en friches à usage de culture agricole sont bien qualifiées comme étant non artificialisées. Les surfaces à usage agricole sont d’ailleurs distinctes des surfaces végétalisées à usage sylvicole.

Les surfaces végétalisées à usage de parc ou jardin public, quel que soit le type de couvert boisé ou herbacé, pourront aussi être considérées comme étant non artificialisées, valorisant ainsi ces espaces de nature en ville. Il en sera de même pour les surfaces végétalisées sur lesquelles seront implantées des installations de panneaux photovoltaïques qui respectent des conditions techniques garantissant qu’elles n’affectent pas durablement les fonctions écologiques du sol ainsi que son potentiel agronomique (agrivoltaisme dont un décret à venir doit préciser les contours).

Cette nomenclature ne concerne toutefois que l’objectif ZAN à l’horizon 2050 et non l’objectif intermédiaire de réduction de moitié du rythme de consommation d’espaces d’ici à 2031. Pendant cette période transitoire de 2021 à 2031, les objectifs porteront uniquement sur la réduction de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers (entendue comme la création ou l’extension effective d’espace urbanisé). Cette nomenclature n’a pas non plus vocation à s’appliquer au niveau d’un projet, pour lequel l’artificialisation induite est appréciée directement au regard de l’altération durable des fonctions écologiques ainsi que du potentiel agronomique du sol.

Par ailleurs, le présent décret précise le contenu du rapport local de suivi de l’artificialisation des sols. L’article 206 de loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets a introduit un article L. 2231-1 au code général des collectivités territoriales pour que les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale compétents, dès lors que leur territoire est couvert par un document d’urbanisme, établissent un rapport tous les trois ans sur le rythme de l’artificialisation des sols et le respect des objectifs déclinés au niveau local. Le premier rapport doit être réalisé trois ans après l’entrée en vigueur de la loi. L’élaboration du rapport s’appuie sur des données mesurables et accessibles, que possède l’ensemble des communes ou leurs groupements, ou qui leur seront mises à disposition par l’État à travers un observatoire national de l’artificialisation des sols. Dès lors qu’elle dispose d’un observatoire local, elle peut le mobiliser en ce sens.
A noter que la circulaire du 7 janvier 2022 a confié aux services déconcentrés la charge de procéder à une telle analyse selon un calendrier identique pour les territoires soumis au règlement national d’urbanisme (RNU).


Une trajectoire territorialisée

À la suite de la promulgation de la loi d’août 2021 instaurant le ZAN, le décret n°2023-1097 définit les règles de gestion économe de l’espace et de lutte contre l’artificialisation des sols. Il prend en compte les efforts passés des collectivités pour ne pas bétonner les sols.

La trajectoire progressive vers l’absence d’artificialisation nette d’ici 2050 est à décliner dans les documents de planification et d’urbanisme  :

  • les schémas régionaux (SRADDET, Sdrif, Sar, Padduc) doivent intégrer et territorialiser cet objectif avant le 22 novembre 2024,
  • les SCoT avant le 22 février 2027 et les PLU(i),
  • les cartes communales avant le 22 février 2028.

En outre, le décret ne prévoit plus la fixation obligatoire d’une cible chiffrée d’artificialisation à l’échelle infra-régionale dans les règles générales du Sraddet. Et chaque Région peut notamment opter, via son document de planification, pour réserver par avance une enveloppe de surfaces à artificialiser destinée à des activités agricoles, et qui sera donc mobilisée en tant que de besoin pour la période après 2031.

Par ailleurs, une surface minimale d’un hectare de consommation d’espaces est garantie à toutes les communes couvertes par un document d’urbanisme prescrit, arrêté ou approuvé avant le 22 août 2026, pour la période 2021-2031. Cette garantie communale peut être mutualisée au niveau intercommunal à la demande des communes. Pour les communes nouvelles (après 2011), une majoration de la surface minimale de 0,5 hectare est appliquée pour chaque commune déléguée dans une limite de 2 hectares.

Dans son analyse n°129, France Stratégie estime que « Cela concernerait potentiellement 15 235 communes qui auraient moins de 1 hectare à artificialiser et pourrait conduire à un report de droits à consommer vers ces communes, d’un total de 9 309 hectares au maximum sur la décennie (soit 9 % de l’enveloppe à territorialiser) ».


Commission régionale de conciliation sur les projets d’envergure

La loi du 20 juillet 2023 fixe également à 12 500 ha l’enveloppe décennale (2021-2031) qui sera réservée aux projets d’envergure nationale ou européenne et d’intérêt général majeur, dont 10 000 ha seront répartis entre les différentes régions dotées d’un Sraddet.

Selon le troisième décret n°2023-1098, une commission de conciliation entre l’État et la région est prévue, en cas de désaccord sur la liste des projets d’envergure concernés (projets industriels, autoroutes, lignes à grande vitesse, prisons, zones aéroportuaires, etc). Un arrêté ministériel, attendu avant fin mars 2024, présentera cette liste qui sera amenée à évoluer en fonction de la maturité des projets.

Pour en savoir plus, un guide synthétique sur le ZAN vient d’être publié et est accessible sur le site du ministère  : https://www.ecologie.gouv.fr/artificialisation-des-sols#scroll-nav__5




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